Décembre 2013 - Atelier international

·         Résumé de l’intervention introductive de José Puig, directeur de l’INS HEA.

M. Puig estime très important le dialogue autour des sciences avec les publics qui nous intéressent. Il présente l'INS HEA, qui est un  établissement installé à Suresnes, d'enseignement supérieur et de recherche : il a pour vocation la formation, la recherche et la publication de ressources pédagogiques.

L'établissement a été chargé depuis longtemps de former les enseignants spécialisés qui travaillent avec des élèves handicapés aussi bien dans le premier degré que dans le second degré. Si les enseignants spécialisés travaillent directement avec des élèves handicapés, ils jouent de plus en plus un rôle de conseillers auprès des enseignants ordinaires qui accueillent dans le cadre de l'inclusion scolaire des élèves avec handicap. D'autres professionnels comme les éducateurs techniques sont aussi formés à l’INS HEA.

 La deuxième mission de l'institut est une mission de recherche. Une quinzaine de chercheurs universitaires qui appartiennent à des disciplines différentes, travaillent à l’INS HEA. Le laboratoire interdisciplinaire travaille principalement sur l'accessibilité.

La troisième mission est la production de ressources pédagogiques, documentaires, numériques.

Avec la main à la pâte, un axe de travail sur l'enseignement des sciences pour les élèves handicapés a vu le jour. Les disciplines scientifiques doivent permettre aux élèves de participer aux activités proposées et d'y réussir, même si des obstacles peuvent se présenter au cours des activités en sciences ; il s'agit d'aller au-delà de la dispense et de trouver des moyens pour rendre les activités accessibles. En outre, la culture scientifique pour tous les élèves est un élément formateur. Les activités scientifiques structurent la pensée, et provoquent la curiosité intellectuelle, la joie de réussir. Ceci doit être accessible à tous les élèves malgré les difficultés.

•         Résumé de la conférence de Michel Fardeau : About the extension of « La main à la pâte » towards disabled children An historical and prospective overview

L’importance accordée au fait que les élèves handicapés participent à l’opération la main à la pâte  participe à la réflexion qui, depuis deux siècles, est menée autour de : comment former au mieux les enfants handicapés. Cette histoire a été marquée par un certain nombre de personnes.

Le siècle des lumières a été marqué par des figures telles que le philosophe sensualiste Locke, le professeur aveugle Nicolas Saunderson, Denis Diderot avec « la lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient », Michel de l’Epée pour l’éducation des enfants sourds-muets, et Valentin Hauÿ pour celle des enfants aveugles. Au XIXe siècle, c’est Jean Itard et l’enfant sauvage puis Edouard Séguin et Désiré Magloire Bourneville qui sont des figures centrales. Le début du XXe siècle, marqué par la première guerre mondiale, a vu l’obligation d’emploi des Invalides et Mutilés. Entre les deux guerres, la notion de handicap émerge et sont  crées de grandes associations comme l’Adapt en 1928 et l’APF en 1933.

A la fin du XXe siècle, des progrès dans l’analyse conceptuelle du handicap sont menés, ce qui a pour conséquence l’élaboration de classifications internationales avec Philip Wood. Les classifications sont ainsi peu à peu révisées grâce aux progrès conceptuels.

Au niveau des pays occidentaux, les politiques diffèrent, certaines, comme en France, mettant en avant la compensation pour les personnes handicapées alors que d’autres, notamment au niveau des pays nordiques, favorisent la non discrimination et l’intégration collective.

En France, l’extension de la main à la pâte est en plein accord avec les politiques non discriminantes pour l’éducation. De plus, les résultats de cette expérience seront probablement très profitables pour tous les élèves sans handicap.

•         Résumé des interventions des participantes chinoises

L'éducation aux sciences dans les écoles spécialisées à Nanjing (Song Xiuling)

La plupart des écoles spéciales à Nanjing sont dédiées aux élèves avec retard mental ; on trouve cependant une école pour les sourds et une autre pour les aveugles. Si les élèves qui ont des difficultés légères sont  scolarisés dans des écoles ordinaires, deux tiers des enfants handicapés sont scolarisés dans des écoles spéciales séparées du milieu ordinaire.

En ce qui concerne les élèves avec des handicaps visuels, auditifs, la référence au programme national ordinaire est présente et des moments de discussion sont organisés entre les enseignants ordinaires et les enseignants des écoles spéciales. Si des adaptations en lien avec les besoins éducatifs sont élaborées en fonction des handicaps sensoriels, les enseignants manquent de ressources, notamment ce qui concerne les enfants aveugles.

Pour les élèves avec un handicap mental qui sont dans les écoles spéciales, il est difficile d'apprendre le savoir scientifique tel quel ; c'est pour cela qu'en 2007, le ministre de l'éducation a créé un programme spécial pour les écoles pour les élèves déficients intellectuels. La priorité concerne la citoyenneté et l'aide à la famille. Les besoins de la vie de tous les jours servent alors de base à l'enseignement des sciences. Ainsi des visites à l'extérieur de la classe sont souvent organisées. Par exemple, en automne, un  travail sera mené autour des feuilles, les élèves iront dans la nature en recueillir.

Au-delà du savoir scientifique, ce sont les compétences sociales qui sont visées.

Think tank Handsbrain Education (Olive Li)

Le Think tank Handsbrain Education est une organisation professionnelle pour la formation des enseignants ; il s'agit de développer des ressources en éducation scientifique pour les élèves handicapés afin de  permettre leur développement. Des symposiums internationaux, des modules spécialisés, de la formation des enseignants sont mis en œuvre. Des modules d'enseignement des sciences sont sélectionnés et adaptés par rapport au handicap des élèves. La formation des enseignants est mise en place pour bien comprendre ce que c'est que l'enseignement des sciences basé sur l’investigation ; un site Internet a été élaboré dans lequel on peut trouver des informations concernant des modules de formation.

Résumé des interventions des participants mexicains

« Inquiry Based Science Education Program as e Strategy to Enhance Cognitive Development in Students with Disabilities and Special Needs in Mexico »

Des éléments historiques concernant la scolarisation des élèves handicapés ainsi que la formation de leurs maîtres sont indiqués par l'intervenant. La proportion de personnes handicapées, que ce soit des enfants ou des adultes sont indiqués. INNOVEC (l'innovation dans l'éducation en sciences) promeut la recherche-innovation et le développement de stratégies pour améliorer l’enseignement des sciences à travers une approche basée sur l'investigation. Il s'agit donc de faciliter la mise en œuvre de l'enseignement des sciences basées sur l'investigation, mais aussi de promouvoir la création de centres de ressources, permettre le développement professionnel des enseignants ; un certain nombre d'ateliers relatifs à l'enseignement des sciences sont créés pour permettre le partage d'expériences et de bonnes pratiques. À travers des coopérations à l'international avec les États-Unis la France, INNOVEC adapte certains contenus issus d'autres pays au contexte spécifique du Mexique.

Le but du programme IBSE (système d’enseignement des sciences basé sur l’investigation) dans le cadre de l'éducation spécialisée consiste à apprendre à observer, utiliser des outils spécifiques et développer une attitude scientifique. Il s’agit d’amener à voir quelles peuvent être les applications de la science dans la vie et la société et de développer l’intérêt de faire des sciences. Le programme se centre sur le vivant . Les enfants pourront imiter le comportement des êtres vivants et de réaliser que ces créatures ont besoin de soins et de nourriture.

Selon les années, différents travaux ont été menés, comme par exemple avec des vers de terre. Les expériences relatives à cette démarche ont montré chez les enfants un accroissement de la sensibilité par rapport aux soins et au respect des choses vivantes, de l'environnement. Les élèves ont développé des compétences de communication et au niveau des interactions.et ont coopéré, ce qui a développé le sens de la solidarité.

Les capacités d'attention, de mémoire, de raisonnement logique et de perception ont été développées. Le sens de la curiosité s'est accru, les enfants prennent davantage soin des êtres vivants. En ce qui concerne le développement professionnel des enseignants, certains se sont rendu compte qu'il y avait une autre manière de faire de la science. Un travail collaboratif a été mené entre enseignants pour améliorer leur stratégie pédagogique ; les parents se sont sentis davantage concernés par les progrès au niveau comportemental de leurs enfants et se sont investis dans certaines activités de l'école.

•         Conclusions et perspectives

Les participants s’accordent pour considérer comme essentiel de capitaliser les expériences de chaque pays ; aussi,  un espace d'échange sur Internet où l'on pourra collecter l'ensemble des documents est envisagé.

Cet atelier international n’est qu’un commencement, une prochaine réunion pourrait être organisée, par exemple dans deux ans. Il s'agira de voir à partir de l'impulsion de cet atelier quelle sera la situation dans deux ans. Des spécificités liées au contexte ont été mises en avant dans chaque pays, ce qui a attiré l'attention des autres. Il est intéressant de voir les points communs, mais aussi les différences entre chaque contexte.

L'idée de focaliser sur un point précis pour la prochaine rencontre est soumise. Par exemple, partir sur une même thématique de séance et voir comment chaque pays pourrait la décliner à partir de son contexte serait une voie possible pour partager les expériences.

Les participants soulignent l’importance de la création d'outils pour les enseignants amenés à travailler avec des élèves handicapés. La traduction de travaux concernant, directement ou indirectement, l’enseignement des sciences avec des élèves handicapés, pour l’instant disponibles dans une seule langue, serait d’un grand intérêt.

Conclusion de Pierre Léna (Président Fondation main à la pâte, Académie des Sciences)

Pierre Léna remercie tous les participants, que ce soit le partenaire INS HEA ou les autres participants qui sont venus de loin. Il pointe plusieurs enjeux.

Pourquoi s'occuper de ces enfants handicapés alors qu'il y a déjà tellement à faire avec les élèves tout venants. ? Dans les conférences internationales, c'est souvent la compétitivité qui est mise en avant à travers l'enseignement des sciences. La fondation la main la pâte pense qu'il y a une autre raison plus fondamentale de faire de la science avec tous les enfants. Il s’agit de faire en sorte que chacun devienne un homme. Cet enjeu concerne tous les élèves, pas seulement ceux qui sont dans la compétition, mais notamment les plus défavorisés, soit pour des raisons économiques, familiales, génétiques, ou liées des accidents de la vie.

Mais alors pourquoi les sciences ? Ces enfants handicapés doivent avoir un projet, un projet de vie adulte. Il faut chercher alors leurs compétences. Or dans les classes, il a été vu que pour certains élèves handicapés, des compétences singulières se sont révélées à travers l'enseignement des sciences.

M. Léna fait alors un lien avec la conférence de Caroline Huron, notamment tout ce qui concerne les tâches multiples. Les activités de sciences relèvent de la triple voire de la quadruple tâche. Il faut en effet écrire, parler manipuler etc. Cela fait appel à beaucoup de capacités du cerveau. Le chantier est peut-être à la fois plus complexe que pour la lecture ou les mathématiques mais potentiellement plus riche. Les sciences sont un bon sujet pour apprendre à gérer des tâches complexes.

P. Léna souligne que le rapport entre les neurosciences et l'enseignement est un rapport compliqué mais qui intéresse vivement la fondation la main la pâte. Il faut cependant se méfier de trop de simplisme en ce domaine. Si connaître le fonctionnement du cerveau ne remplacera pas le professeur, cela pourrait l’aider dans son travail.

Finalement, Pierre Léna se réjouit de la dimension internationale de l'événement. Si l’atelier se renouvelle dans deux ans, peut-être se déroulera-t-il dans un autre pays que la France, peut-être faudra-t-il l’élargir à d’autres pays. En outre, ce programme d’enseignement des sciences à des élèves handicapés pourrait être porté dans des instances internationales, comme l’Unesco.

Les 4 fichiers PPT à télécharger:

- communication of nanjing.ppt

- intervention Michel Fardeau.ppt

- Olive Lee-China-20131202.ppt

- SSEC Presentation to publish.pptx